30 août : soutenance de thèse de Charles PEBEREAU

30 Août 2021 Recherche

    Charles PEBEREAU soutiendra sa thèse en sciences économiques le lundi 30 août 2021 à 15h00. Auditorium 4
La soutenance sera également transmise par visioconférence (pour assister à la soutenance, merci de contacter Elvire JALRAN)

Sujet de thèse : Essays in Industrial Organization

Directeur de Thèse: Jean Tirole

Les membres du jury sont :

- Mar Reguant, Professeure d’économie, Northwestern University

- Heski Bar-Isaac, Professeur d’économie, University of Toronto

- Johannes Horner, Professeur d’économie, Université de Yale

- Stefan Ambec, Directeur de recherche, INRAE

- Mathias Reynaert, Assistant professeur, UT1 Capitole – TSE

- Jean Tirole, Président honoraire TSE & IAST, UT1 Capitole – TSE


Résumé : Cette thèse, constituée de trois chapitres, mobilise des outils d’économie industrielle pour aborder certains des défis et des préoccupations qui sont apparus avec le l’essor des technologies de l’information. Dans les deux premiers chapitres, je développe un cadre théorique pour étudier des questions sociétales liées à la collecte et l’utilisation des données personnelles. En particulier, j’explore l’idée que l’on peut encourager certains comportements en exploitant ces données - plutôt qu’avec des incitations financières. Le premier chapitre est motivé par la demande croissante d’un meilleur contrôle concernant qui peut accéder aux données personnelles et à quelles fins - en particulier à propos de la pratique de plus en plus courante, tant par les autorités publiques que par les entreprises privées, qui consiste à noter les individus. Si la divulgation d’informations rend les individus responsables de leurs actions et peut protéger les autres de rencontres indésirables, elle augmente également l’ostracisme et les stratégies d’évitement coûteuses. J’étudie, pour divers objectifs, quelle est la stratégie efficace de divulgation d’informations par un principal à pro- pos d’un agent qui se préoccupe de sa réputation vis-à-vis de multiples publics qui diffèrent par l’utilité qu’ont ces informations pour eux. Divulguer de l’information à un public met en péril la réputation de l’agent et incite donc à l’effort, et l’effort qu’il exerce augmente avec la quantité d’information révélée. Pour maximiser l’effort sous une contrainte de participation, il est optimal de divulguer des informations indifférenciées aux publics pour qui ces informations sont le plus utiles et de protéger la réputation de l’agent vis-à-vis des autres publics. Lorsque le principal internalise le bien être de chacun des publics la divulgation n’est plus indifférenciée. Au contraire, il fournit d’autant plus d’informations à un public qu’elles lui sont utiles et, en contrepartie, protège mieux la réputation de l’agent vis-à-vis des autres publics. Les résultats peuvent rationaliser les lois existantes pour la protection des travailleurs et des consommateurs, et alimenter le débat sur la notation sociale ou encore le partage d’informations entre entreprises ou au sein des plateformes multifaces. Dans le deuxième chapitre, j’étudie de quelle manière une plateforme peut exploiter les informations personnelles pour décider qui accepter et comment apparier les individus afin d’encourager des comportements pro-sociaux. Je construis un modèle en partant de l’hypothèse que certains individus sont de meilleurs partenaires que d’autres - par exemple parce qu’ils ont un comportement plus altruiste - et je demande avec qui les jumeler. Il n’y a pas de transferts monétaires pour fournir des incitations mais la plateforme peut utiliser les partenaires les plus désirables comme une récompense pour les individus ayant adopté un comportement pro-social. Je caractérise le mécanisme d’appariement qui maximise le bien-être sur la plateforme. Ce mécanisme n’est cependant pas robuste contre l’entrée d’un concurrent et je montre que la concurrence pousse les plateformes à choisir des mécanismes dits d’“appariement assortatif positif” (PAM) par lesquels les individus les plus désirables sont appariés ensemble. Par conséquent, l’entrée d’une nouvelle plateforme crée un problème de hold-up qui réduit l’effort fourni par les individus puisqu’ils sont moins récompensés pour leurs comportements pro-sociaux. Ce problème est exacerbé par la portabilité des données, car elle permet à l’entrant de sélectionner les individus plus efficacement. Le cadre développé dans ce chapitre est pertinent pour la régulation des algorithmes développés par les plate- formes de l’économie à la tâche (ie. “gig economy” en anglais) et peut être adapté pour étudier l’effet de la planification urbaine sur l’harmonie communautaire. Dans le troisième chapitre, co-écrit avec Kevin Remmy, nous étudions l’introduction de la tarification en temps réel de l’électricité en Nouvelle-Zélande - un nouveau tarif reposant sur des compteurs intelligents qui enregistrent des données de consommation détaillées - et notre objectif est d’identifier les obstacles à son adoption. Alors que la théorie économique prévoit que cette tarification sera rapidement adoptée par une large proportion des agents, en Nouvelle-Zélande moins de 1,25 % des consommateurs résidentiels l’ont adopté plus de sept ans après son introduction. Avec ce tarif, les consommateurs sont exposés aux prix du marché spot qui varient toutes les demi-heures, et qui sont incertains et volatils. Nous montrons que lorsque les prix spot s’envolent, les consommateurs qui considéraient adopter cette tarification y renoncent et ceux qui l’ont récemment adopté change de tarification, ce qui est un signe de préférence pour le présent. Cependant, avec de l’expérience, les consommateurs ayant adopté la tarification en temps réel deviennent progressivement moins sensibles aux variations de court terme des prix spot. Ces résultats suggèrent, d’une part, que des pics de prix importants et inattendus peuvent interférer avec le processus de d’adoption, voire l’interrompre, et donc que le moment où le tarif est proposé aux consommateurs est important. Si l’incertitude ne peut être totalement éliminée, certaines périodes sont plus risquées que d’autres et devraient donc être évitées - comme avant un hiver rigoureux dans les régions où le chauffage électrique est répandu. Par ailleurs, le fait que la perception du tarif par les consommateurs change avec l’expérience suggère qu’au préalable ils manquent d’information ou de compréhension concernant les coûts et les bénéfices individuels qu’ils tireraient de cette tarification. Nous proposons des remèdes pour aider les consommateurs à prendre des décisions rationnelles et informées, comme l’utilisation des données de consommation des compteurs intelligents.