Professeur Matteo BOBBA soutiendra ses travaux pour l’habilitation à diriger des recherches (HDR) en Sciences économiques le lundi 6 NOVEMBRE 2023 à 16h30.
Lieu : Zoom
Sur le sujet : «Essays in Development and Labor Economics»
Composition du jury :
- Emmanuelle Auriol : Professeure d'Economie, Université Toulouse Capitole
- Thierry Magnac : Professeur d’Economie, Université Toulouse Capitole
- Petra Todd : Professeure d'Economie, University of Pennsylvania
- Costas Meghir : Professeur d’Economie, Yale University
- Orazio Attanasio : Professeur d’Economie, Yale University
Résumé:
Cette thèse englobe six articles de recherche que j'ai réalisés au cours des sept dernières années pendant ma période de titularisation à TSE. Les sujets de ce travail peuvent être largement regroupés en trois catégories. Une première catégorie vise à comprendre les facteurs qui influencent l'efficacité allocative des marchés du travail dans les pays en développement. Ces marchés sont souvent caractérisés par des frictions importantes, telles que des contrats de travail formels rigides et une auto-emploi de subsistance diffuse. Dans le cadre d'un travail conjoint avec Flabbi et Levy (JoE, 2021 ; IER, 2022), nous formalisons explicitement ces distorsions dans le contexte d'un modèle théorique sur le marché du travail couplé à une structure de négociation pour déterminer les salaires. Nous utilisons ce cadre pour étudier comment les institutions du marché du travail qui favorisent les emplois informels influencent les incitations des individus à acquérir une éducation avant d'entrer sur le marché du travail, ainsi que tout au long de leur vie grâce à l'accumulation de capital humain sur le tas. L'estimation structurelle du modèle à l'aide de données individuelles sur le marché du travail provenant du Mexique urbain et les simulations contrefactuelles qui en résultent permettent d'évaluer dans quelle mesure les paramètres clés du marché du travail, tels que les cotisations salariales et les avantages non contributifs, influencent les rendements de l'éducation et des investissements en capital humain.
Un deuxième volet est consacré à une meilleure compréhension des sources des inégalités spatiales en matière de réussite scolaire. Le niveau et la structure de la rémunération du secteur public jouent tous deux un rôle clé dans la capacité des gouvernements à attirer, retenir et motiver des enseignants talentueux. Cependant, les contrats dans le secteur public offrent généralement des profils de salaire rigides, des échelles salariales plates, qui sont principalement liées à l'ancienneté plutôt qu'au mérite, à la capacité ou aux avantages liés à l'emploi. Dans un travail récent avec une équipe de coauteurs (Bobba et al, Rej&R JPE), nous étudions les effets sur le recrutement, la rétention et la productivité d'une politique qui a augmenté les salaires des enseignants du secteur public de 20% à 30% dans des écoles désignées en zone rurale au Pérou. Nos résultats montrent qu'une politique alternative qui fixe la rémunération à chaque offre d'emploi en tenant compte des préférences des enseignants est plus rentable que la politique réelle en termes de réduction des inégalités structurelles dans l'accès aux opportunités d'apprentissage, et elle améliore probablement l'efficacité du système éducatif. Dans Bobba et Frisancho (JoE 2022), nous concevons et mettons en œuvre une expérience sur le terrain dans le cadre d'un système centralisé d'attribution des écoles à Mexico pour étudier si et comment les perceptions erronées des jeunes concernant leurs propres compétences académiques génèrent des allocations inadéquates à travers des choix scolaires inappropriés. En moyenne, les retours sur les performances réduisent le rôle relatif des antécédents sur les conséquences et déplacent une part substantielle de la probabilité vers le signal. D'autres preuves révèlent que les hommes et les étudiants de statut socio-économique élevé ont tendance à traiter de manière plus efficace les nouvelles informations concernant leurs propres capacités.
Enfin, le dernier volet de mon programme de recherche est consacré à une meilleure compréhension du "problème de l'expansion". Il s'agit de la tendance de l'effet de taille d'une intervention à diminuer, voire à disparaître, lorsque cette intervention est étendue pour toucher une population de bénéficiaires plus vaste (et plus diversifiée). Dans une récente étude (Agostinelli, Avitabile et Bobba, R&R JPE), nous contribuons au débat sur les défis de l'expansion des interventions en éducation. Nous utilisons une étude de cas portant sur un programme de mentorat évalué à grande échelle au Chiapas, l'État le plus pauvre du Mexique. L'analyse englobe deux expériences de terrain indépendantes et saisit une opportunité unique pour tirer des enseignements de la mise en œuvre de la même intervention par le gouvernement. Nos résultats fournissent des preuves convaincantes des facteurs socialement déterminés des interventions éducatives à grande échelle. Faisant suite à des travaux antérieurs sur le mécanisme centralisé d'attribution des écoles à Mexico, Bobba et al. (2023) quantifient l'effet d'une mise en œuvre contrefactuelle et pourtant réalisable de l'intervention en matière d'information à une échelle beaucoup plus grande. Les résultats de la simulation démontrent une hétérogénéité substantielle dans les réponses du côté de la demande, ce qui déclenche des déplacements au sein du mécanisme d'attribution. Les effets d'équilibre de l'intervention pourraient éventuellement entraver les trajectoires académiques ultérieures des étudiants performants et issus de milieux défavorisés.