Dans le cadre de la Cop 21 qui se tiendra à Paris, Toulouse School of Economics et l’université Paris-Dauphine ont lancé un appel pour un prix unique du carbone au niveau mondial. Christian Gollier, directeur général de TSE, revient sur les principes de cet appel.
Pourquoi réclamer la mise en place d’une tarification unique du carbone pour tous les États ?
C’est le principe du pollueur-payeur, le cours numéro un de tout enseignement sur l’économie de l’environnement. Chaque institution qui émet une tonne de carbone doit débourser un prix car c’est le seul moyen pour que chacun participe à l’effort. Quand un État émet du CO² pour se chauffer, les conséquences négatives ne restent pas locales mais bel et bien planétaires. Nous plaidons donc pour un prix universel du carbone. Sa mise en application peut se faire soit via une taxe mondiale, soit via un marché de quota d’émissions négociables à chaque pays. Sans cadre contraignant, sans incitations économiques, la conférence de Paris se soldera par des objectifs de réduction d’émission de gaz à effet de serre par pays, une liste de promesses comme dans le protocole de Kyoto dans les années 90. Une inefficacité totale, selon moi.
Ce principe ne fait pourtant pas l’unanimité dans le monde des économistes ?
Aujourd’hui, près de 180 signataires soutiennent notre appel. Il fait l’unanimité au niveau des économistes internationaux. Il n’y a qu’en France que ce principe soulève des réticences. Trop théorique disent certains, difficile à mettre en œuvre pour d’autres. Comment évaluer le bon prix de la tonne de carbone ? Des études permettent d’ores et déjà de le fixer entre 10 et 50 dollars la tonne. Pour les émissions de chaque pays, des observations satellitaires permettent facilement de les mesurer. Non, le problème reste fondamentalement plus politique qu’économique. L’Arabie Saoudite, le Sénat républicain aux Etats-Unis ou la Russie ont bien entendu intérêt à ne pas mettre en place un tel accord. Ce sera un travail de longue haleine car faire jouer le même jeu à 195 pays prendra du temps. Nos opposants croient en la bienveillance des pays, une forme d’altruisme. Je n’y crois pas.
Cet appel peut-il être entendu pour la conférence de Paris en décembre prochain ?
La Banque Mondiale s’est positionnée en faveur d’un prix du carbone, l’ONU aussi au mois de mai dernier. Notre proposition est sur la table. Nous organisons les 14 et 15 octobre une conférence sur le sujet à l’université Paris-Dauphine, à laquelle participera la ministre Ségolène Royal. Le ministère des Affaires étrangères et celui de l’Écologie nous entendent. Mais nous sommes prêts à remettre l’ouvrage sur le métier, même après la conférence de Paris, qui risque, je le pense, de se solder par un échec sur ce plan. Ce sujet de l’économie du climat est celui du XXIe siècle.