Interview croisée de Jean Tirole, prix Nobel d'Economie et Marion Guillou, présidente de la commission.
Que trouve-t-on dans cette boîte à outils ?
Marion Guillou : Nous sommes partis des atouts de Toulouse. Ainsi, nous estimons que l'aéronautique restera sur le long terme une force de Toulouse. Les sous-traitants d'Airbus ont des compétences fortes dans la mécanique, l'électronique, la simulation, les systèmes, etc. C'est vrai aujourd'hui et ce sera vrai demain. Nous avons éché quatre grands domaines industriels sur lesquels le territoire peut se développer : le spatial et le
climat qui, grâce au NewSpace et aux constellations de satellites représentent un vrai potentiel de croissance; les mobilités du futur avec la voiture autonome qui peut utiliser les technologies de l'aéronautique ou l'avion à hydrogène; les biotechnologies en incluant l'agroalimentaire et les cosmétiques; la médecine du futur avec des atouts toulousains sur les technologies et les données ainsi que beaucoup de compétences médicales.
Jean Tirole : Nous avons aussi éché le tourisme qui peut représenter une très belle opportunité de croissance alors qu'il reste encore sous-exploité. Nous avons désormais le MEETT, le nouveau parc des expositions de Toulouse pour le tourisme d'affaires mais le tourisme, qui aujourd'hui est à 75 % un tourisme d'affaires, a besoin de se développer également vers le tourisme de loisir, qui a un bel avenir. Pour cela, nous avons besoin d'une coordination plus étroite, de créer une marque forte et de construire des packages touristiques. Il manque aussi un bâtiment totem à Toulouse comme Bordeaux peut avoir sa Cité du vin ou Bilbao son Guggenheim. Il ne faut pas hésiter à aller chercher des architectes internationaux pour inscrire Toulouse dans la modernité. L'aménagement du territoire régional qui, grâce à une stratégie foncière adaptée, peut également voir se créer des campus d'entreprises ou universitaires dans un rayon de 50 kilomètres de Toulouse. Il est aussi nécessaire de renforcer la stratégie d'accompagnement de nos start-ups qui sont très nombreuses mais qui ont du mal à grandir. Il faut envoyer les meilleures start-ups à l'étranger à
l'occasion de salons professionnels par exemple pour accélérer leur internationalisation.
Avez-vous pris en compte la problématique du climat ?
Marion Guillou : Oui nous plaidons pour un plan climat territorial à l'échelle de la région, bâti sur plusieurs années. Nous préconisons aussi l'essor d'une agriculture climatique avec par exemple un plan pour les protéines végétales et la mise en place expérimentale d'un mode de compensation carbone pour l'agriculture, et l'aménagement des territoires pour anticiper les dérèglements climatiques.
En quoi consistent les campus des industries que vous évoquez ?
Jean Tirole : Nous sommes partis des besoins futurs en matière d'aéronautique, de biotechnologies et de mobilités du futur pour imaginer la création de trois campus à créer sur plusieurs années pour rassembler dans une unité de lieu tous les savoir-faires dans chacun des domaines, exploiter les synergies et promouvoir la formation.
Marion Guillou : Ces campus ressembleraient les industriels et les formations à mettre en place sur les nouveaux métiers à l'image des campus des industries navales dans d'autres régions.
Quel rôle le secteur public peut-il jouer dans la mise en oeuvre de ces idées ?
Jean Tirole : L'éducation est un élément déterminant pour l'attractivité de notre territoire. L'ouverture d'un nouveau lycée international à Toulouse est indispensable pour accueillir les enfants des familles étrangères.
La ligne à grande vitesse reste-elle déterminante ?
Jean Tirole : Toulouse est, avec Nice, la seule ville encore enclavée de la sorte en France. L'économie en souffre beaucoup même si La Navette nous relie à Paris par l'avion.
Quel rôle jouera Airbus dans les solutions pour le futur ?
Marion Guillou : Airbus sera un des acteurs du changement. Quand il propose un avion vert, cela mobilisera énormément de ressources intellectuelles, industrielles et nancières qui irrigueront tout le territoire.
Jean Tirole : Airbus restera un acteur crucial dans sa région et son industrie. Il va aussi se reconstruire en partie, ce qu'il a commencé à faire avec le projet de l'avion à hydrogène, qui nécessitera un environnement de l'innovation performant.
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Authors
- Jean Tirole
- Marie Guillou