La politique purement répressive menée en France a montré son inefficacité à protéger nos jeunes. A contrario, tous les pays ayantchoisi de légaliser cette drogue s'en félicitent. Alors que de nombreux pays, y compris parmi nos voisins, ont légalisé le cannabis, la France choisit d'intensifier la guerre contre la drogue. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, croit sans doute qu'il va réussir là où ses prédécesseurs et tous les autres pays du monde ont échoué, dont les Etats-Unis, malgré des moyens colossaux. Cette décision, qui pourrait se comprendre si l'on manquait de recul sur les effets de la prohibition, s'apparente à de l'aveuglement idéologique et à de la paresse intellectuelle. Cette politique n'enrayera ni le trafic ni la consommation, et sera coûteuse en vies humaines, que ce soit chez les trafiquants, les forces de l'ordre ou les malheureux pris entre les deux. Sans parler du coût pour les finances publiques. Le système de prohibition, promu depuis cinquante ans, est un échec. Il a été inapte à protéger les mineurs français, qui figurent parmi les plus gros consommateurs européens (voir graphique). On sait depuis longtemps que rendre un produit illégal ne supprime pas la demande. La prohibition ne marche que lorsque la demande pour le produit prohibé est faible. Si cette dernière est forte, la seule conséquence notable est l'émergence du crime organisé. Alléché par les profits considérables générés par une demande frustrée, il s'engouffre dans la brèche. Tant que ces profits existent, il y a des criminels pour servir le marché. Si on démantèle un réseau, un autre prend sa place. C'est un combat sans fin.
C'est pour cela que les pays désirant contrôler le marché du cannabis et sa consommation choisissent un à un de le légaliser. Certes, il a pu y avoir des ratés au début, comme la pénurie de cannabis liée à une sous-estimation de la demande au Canada ou des intoxications au Colorado, liées à sa consommation sous forme de bonbons ou de gâteaux. Mais aucun des pays ou des Etats l'ayant légalisé ne souhaite revenir en arrière. Ainsi, selon une étude américaine, publiée à l'issue des deux premières années de légalisation (2014-2015) dans les Etats de Washington et du Colorado, la consommation chez les ados aurait diminué de 12% avec l'affaiblissement du marché noir. En dépit des discours martiaux, la prohibition prônée par Gérald Darmanin, en laissant le champ libre à des criminels violents, est donc une politique laxiste et socialement irresponsable. Or le ministre a raison sur un point : le cannabis est dangereux pour les plus jeunes. C'est pour cela que ce marché doit être régulé par l'Etat, tout comme l'est celui de l'alcool ou du tabac?