Taxer veaux, vaches et cochons… L’idée n’est pas neuve. Elle a été mentionnée dès 2009, dans un rapport du Centre d’Analyse Stratégique. La commission Quinet, en se basant sur un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 20 % en 2020 et de 60 % en 2050, recommandait alors de taxer l’ensemble des émetteurs de CO2, avec une redevance de 56 € la tonne émise en 2020, augmentant progressivement jusqu’à 200 € en 2050.
Ces préconisations ont été le point de départ des travaux pluridisciplinaires coordonnés par Céline Bonnet, professeur à Toulouse School of Economics (TSE) et directrice de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA).
Le constat de départ est assez simple : l’alimentation est responsable à l’échelle mondiale d’un quart des émissions de gaz à effets de serre, les 2/3 de ces émissions provenant de l’élevage. Agir dans ce domaine a donc un impact important sur l’évolution du climat.
Céline Bonnet et ses collègues ont contribué au débat en comparant l’effet des différentes manières possibles de taxer les produits d’origine animale.
« Notre objectif a été de concevoir un impôt proportionnel à l’incidence environnementale de chaque aliment. Nous avons comparé en particulier les effets d’une taxe ciblant uniquement la viande rouge et d’une autre qui viserait l’ensemble des produits animaux »,
Poulet : trois fois moins d’émissions que le bœuf
Les différentes formes d’élevage n’ont pas le même impact en matière de réchauffement climatique. Une grillade de 100 g de bœuf génère par exemple une émission de 1500 g de CO2 équivalent, tandis que la même quantité de veau, d’agneau ou de mouton en produit 1200 g, 700 g s’il s’agit de porc et 500 g pour du poulet ou du poisson...
« Nous avons comparé différents scénari et conclu qu’en taxant uniquement le bœuf, on obtiendrait la moitié des effets d’un impôt sur l’ensemble des produits animaux, à savoir une réduction de 3 % des gaz à effet de serre, avec un coût pour le consommateur correspondant à un huitième d’une taxation de l’ensemble des viandes », indique Céline Bonnet.
La chercheuse avance des chiffres précis pour les consommateurs. « Appliquer la taxe de 56 € sur la tonne de C02 émise (envisagée pour 2020) reviendrait à augmenter le prix du kilo de bœuf de 6 à 12 % et appliquer la taxe à 200 € (envisagée pour 2050) augmenterait le prix de 20 à 40 % en fonction des morceaux choisis », estime-elle.
« Le fait de ne taxer que le bœuf apparaît donc, au regard de nos travaux, comme la solution la plus acceptable »
Ce travail a été publié dans la revue Ecological Economics et sera présenté le 11 octobre 2018 à Paris devant des industriels et décideurs publics à l’occasion d’un colloque organisé par l’INRA.